L'abbaye Notre-Dame d'Orval
Moyen Âge
Le site de l’abbaye d’Orval (monument classé, 17-06-1971) fut défriché entre 1500 et 1200 avant notre ère ; dès ce moment, l’occupation humaine y est pratiquement continue. Une hypothèse séduisante a été suggérée par feu Fr. Bourgeois « une population se serait installée aux abords de la source d’Orval considérée comme un lieu de culte ou de pèlerinage ». Ceci justifierait l’existence d’un cimetière franc sur la pente de la colline environnante. Avec le temps, cette population serait passée au christianisme et ses évangélisateurs auraient construit un petit bâtiment religieux.
Par la suite, un oratoire fut construit vers le Xe siècle sur le même emplacement. De 23 m sur 12 m, il se termine par une abside et deux absidioles (1).
Ce site fut abandonné à la fin du XIe siècle et repris, vers 1070, par des moines venus de Chalade, abbaye située à quelques kilomètres de Verdun dans la forêt d’Argonne. Les terres leur furent données par Arnold II, comte de Chiny. Ceux-ci bâtirent une petite église et quelques bâtiments conventuels mais durent abandonner le site après une quarantaine d’années. C’est une communauté de chanoines réguliers de Cheminon qui acheva les travaux entrepris par leurs prédécesseurs. L’église, consacrée le 30 septembre 1124 par l’évêque de Verdun, Henri de Winton, n’avait qu’une nef, à large transept ouvert sur un chœur carré encadré de quatre chapelles (2).
Le 9 mars 1132, des cisterciens de Trois-Fontaines reprirent les structures existantes et décidèrent de les remplacer par un monastère conforme au plan et au style de leur ordre. Ils édifièrent d’abord le monastère comprenant entre autres : un armarium ou armoire pour les livres liturgiques (3), une sacristie (4), une salle capitulaire (5) et un dortoir, un scriptorium avec la salle des moines (6), un réfectoire (7), un chauffoir et une cuisine (8), un cellier (9), un réfectoire et un dortoir pour les convers (10) ainsi que le cloître (11). Les travaux de la nouvelle église Notre-Dame débutèrent vers 1160-1170, dans le style roman et se terminèrent dans le style gothique. L’église fut consacrée en 1232.
Suite à des dégâts importants, une bonne partie de l’église fut reconstruite vers la moitié du XVIe siècle. Cela fut suivi par des agrandissements et transformations, suite à l’accroissement de la communauté engendré par le renouveau spirituel suscité par l’Abbé B. de Montgaillard. L’afflux de vocations sous l’Abbé C. de Bentzeradt répéta le même processus. L’église Notre-Dame fut abandonnée en 1782 pour la nouvelle abbatiale Saint-Bernard.
Malgré les transformations et ajouts successifs, le monastère était devenu trop petit ; en outre, il était humide et insalubre. Sous la direction de l’Abbé Effleur, la communauté prit la décision de construire une abbatiale et choisit à cet effet l’architecte Laurent-Benoît Devez (1731-1812). Pour assurer la salubrité de l’édifice, on construisit un vaste réseau de caves sous lesquelles un système de canalisations effectuait le drainage et permettait l’évacuation des déchets par des chasses d’eau. L’église, consacrée en 1782, de 100 m sur 40 m, fut construite dans le style néo-classique. Son décor comprenait des frontons triangulaires, des pilastres de style ionique, des colonnes corinthiennes, une tour octogonale avec coupole, ainsi que des statues monumentales. Le vaste espace intérieur reprenait les mêmes caractéristiques et était orné de stucs, de fresques et tableaux peints par le frère Abraham Gilson, ainsi que des ferronneries d’art produites par l’atelier du frère Amand Robin. Un orgue à 4 claviers et 80 jeux, décrit comme le troisième orgue du monde, provenait de l’orguier Nollet, de Trèves. Le monastère était disposé autour de cette église comme un vaste quadrilatère.
Cet ensemble architectural et toutes ses richesses ont disparu dans la tourmente de la Révolution française. Les pierres des murs furent vendues. Seules les caves subsistent, servant aujourd’hui de fondations au monastère moderne. En 1860, on se préoccupa de sauver les restes. A partir de 1913, les ruines furent progressivement déblayées et dès 1926, quelques reconstructions furent entreprises pour les rendre plus expressives.
En 1926, les moines revinrent à Orval. Dom Marie-Albert van der Cruyssem s’attela à la restauration de l’abbaye. M. Henry Vaes, architecte, élabora les plans, en s’inspirant de l’architecture cistercienne française médiévale. La façade, servant d’écrin à la statue de Notre-Dame, sculptée par Lode Vleeshouwers, reste un monument de l’art belge contemporain.
LA LÉGENDE DE LA COMTESSE MATHILDE
A la fin du XIe siècle, la comtesse Mathilde, duchesse de Toscane et suzeraine du comte de Chiny, perdit son mari, Godefroid le Bossu, duc de Lorraine. Pour se consoler de son veuvage, elle vint à Bouillon chez sa belle-mère. Malheureusement, son fils âgé de huit ans se noya un jour d’hiver dans la Semois. Dans sa douleur, elle se rapprocha de l’abbaye dont les moines devinrent ses protégés.
Par une journée d’été, alors qu’elle faisait sa promenade habituelle dans la vallée, Mathilde s’assit au bord d’une petite fontaine. Elle y plongea la main. Soudain, elle s’aperçut que son anneau nuptial, glissé de son doigt, avait disparu dans l’onde. Voyant toutes ses recherches pour retrouver le bijou restées infructueuses, son cœur se serra de douleur. Elle fit le voeu de doter richement le couvent naissant si l’objet vénéré lui était rendu. Tous prièrent la Vierge qui exauça leurs souhaits d’une façon aussi miraculeuse qu’inattendue.
A la surprise générale, une truite surgit à la surface de la fontaine et rejeta l’anneau sur le bord. Dans sa joie, Mathilde s’écria : « Vraiment, c’est ici un Val d’Or ».
Texte résumé par I. Tellier. Fiche 92.3. Photos : G. Focant. Pour en savoir plus : (COLLECTIF), 1970. Catalogue d’exposition du 900e anniversaire de l’Abbaye d’Orval, année 1970, Orval.
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